L'extrême-droite n'est pas du côté du peuple

Ce vendredi 21 février, en réponse aux dégradations de la fresque en hommage à Steve Maia Caniço, commises par l’extrême-droite il y a deux jours, un rassemblement est prévu devant la grue jaune à 18h. Pour rappel, ce jeune homme est mort noyé le soir de la Fête de la musique en Juin dernier, à la suite d’une charge policière sur les bords de Loire.

Pour la seconde fois en deux semaines, la fresque représentant Steve et dénonçant les violences policières a fait l’objet de dégradations importantes. Cette fois-ci, elle a été aspergée de goudron formant une croix celtique, accompagnée des inscriptions « Justice pour Mila, Esteban, Marin … ». À n’en pas douter, ces symboles proviennent de l’extrême droite et plus particulièrement de personnes qui s’identifient au Groupe Union Défense : de jeunes néo-nazis, issus pour la plupart de milieux aisés et régulièrement protégés par le duo police-justice.

Alors que les violences policières ne font que croître, entraînant la mort de plus d’une dizaine de personnes chaque année et atteignant un record du nombre de blessé.e.s lors du mouvement des Gilets Jaunes, ces inscriptions sont significatives des préoccupations politiques d’une extrême-droite dont les idées ont imprégné l’ensemble du paysage politique, judiciaire et médiatique français. L’extrême-droite n’est pas au pouvoir, mais ses thématiques travaillent et dominent les esprits de la classe politique, plus particulièrement de celles et ceux qui ont vocation à gouverner.

Depuis septembre 2018, Esteban Morillo – principal suspect dans l’affaire de la mort de Clément Méric – est mis en examen pour « violences volontaires en réunion avec arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner ». Ancien membre de l’ex-groupuscule néo-nazi Troisième Voie, l’assassin de Clément Meric a pourtant été remis en liberté sous contrôle judiciaire par la Cour d’Appel de Paris. En faisant le choix de cette remise en liberté, le parquet assume donc de banaliser les actes de violence émanant de l’extrême-droite.

Les propos de Mila, et leur promotion médiatique, s’inscrivent dans cette même logique de banalisation des idées d’extrême-droite. Il y a maintenant un mois, Mila, une jeune femme de 16 ans, a reçu une vague d’insultes et de menaces de mort après avoir publié un live dans lequel elle tenait des propos islamophobes et racistes. Une enquête a été ouverte pour « provocation à la haine à l’égard d’un groupe de personnes », puis classée sans suite. Le parquet estimant qu’elle ne faisait qu’exprimer « une opinion personnelle à l’égard d’une religion ».

En revanche, une autre enquête a été ouverte pour « menaces de mort » à son encontre. D’abord reprise au sein de la fachosphère, l’affaire a très rapidement fait l’objet d’une récupération politique bien plus large. Toute la presse française, de même que les hautes sphères gouvernementales, se sont emparées du sujet, « Je suis Mila » faisant figure de symbole de la liberté d’expression et du droit au blasphème au même titre qu’à l’époque de « Je suis Charlie ».

Il apparaît que la gestion judiciaire comme politique des questions liées au racisme et à l’islamophobie fait système, c’est-à-dire qu’un ensemble de processus institutionnels fonctionnent désormais ensemble, de manière explicite, pour prévenir d’une potentielle menace fantasmée, tout en reprenant les objets de langage véhiculés par l’extrême droite la plus crade.

En ce sens, il n’est pas anodin que la nouvelle priorité de Macron soit celle d’un « séparatisme musulman », qui serait incompatible avec la liberté et l’égalité, incompatible avec l’indivisibilité de la République et la nécessaire « unité de la Nation ». Cela illustre l’obsession qui entoure la question de l’islam, sous couvert de défense de la tradition et des valeurs françaises ou bien encore ici républicaines. Les musulmans ne sont pas à côté de la République par une volonté qui serait la leur, mais traités comme une population différente et stigmatisée par des intentions d’isolement supposées. Les beaux quartiers sont également des territoires hermétiques socialement, pour autant les médias n’en parlent que rarement – inutile de préciser le pourquoi du comment.

De toute évidence, l’extrême droite n’est pas du côté du peuple. Ses actions démontrent qu’elle est liée idéologiquement aux classes dominantes et à la police, qui est la représentation la plus criante de la coercition physique et psychologique. S’en prendre à la fresque en hommage à Steve est une attaque contre l’ensemble de celles et ceux qui subissent les violences policière au quotidien et un soutien explicite à celles et ceux qui frappent les corps des manifestants comme des habitants des quartiers populaires.

Voir également cet article de Nantes révoltée sur le sujet : https://www.nantes-revoltee.com/la-fresque-pour-steve-totalement-saccagee-par-lextreme-droite/

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