Entretien avec deux ouvriers de la logistique pharmaceutique.
Alors que les patrons de la pharmaceutique fanfaronnent sur leur participation à l’ « effort de guerre », la réalité est tout autre dans les entrepôts du secteur. Dans cet entretien, deux ouvriers syndicalistes du groupe EHDH – leader européen de la logistique pharmaceutique – décrivent les véritables lignes de front, entre des directions dans le déni et des salariés qui cherchent à se protéger et à protéger les autres. Ils reviennent aussi sur la casse sociale qui touche le secteur depuis des années et sur les failles d’un système logistique qui repose massivement sur la sous-traitance. Si les masques ne sont toujours pas disponibles en quantité suffisante, c’est aussi la conséquence de ces modes d’exploitation. Ce processus pourrait d’ailleurs s’accélérer dans l’après crise, avec le rachat des boites en faillite et les restructurations qui s’en suivront.
Vous bossez tous les deux dans le transport pharmaceutique. Est-ce que vous pouvez nous expliquer de quel type d’entreprise il s’agit ?
Mohamed : Moi je suis chez EuroTranspharma. C’est une boite de logistique en pharma qui appartient à la holding EHDH. Une grosse boite, présidée par des gens qui ont le bras long. Depuis 8 ans, le chiffre d’affaire est en hausse continue. Mais dans l’entrepôt on ne touche pas l’argent, tout est redirigé vers des actionnaires ou des filiales. C’est des boites qui grossissent en rachetant des concurrents, comme Moviento récemment, ce qui nous place en tête du secteur au niveau européen.
Le site où je bosse se situe à Moussy-le-neuf, à la frontière du 77 et du 95, à une dizaine de kilomètres de Roissy. Notre spécialité c’est la pharmaceutique en température dirigée, donc entre 2-8 C° et 14-25C° selon les produits. C’est un marché énorme, parce que les nouvelles normes européennes imposent la température dirigée pour tout un tas de produits pharmaceutiques. C’est des vaccins, du matériel de dialyse, du paracétamol, etc. On fait quand même 30% des volumes au niveau national. On livre le commerce, les pharmacies, les labos, les cabinets médicaux, mais aussi les hôpitaux, notamment en Ile-de-France.
Artur : Moi je travaille chez Ciblex, une boite de logistique qui a été rachetée par EHDH en 2014. Avant on appartenait à Geodis et avant à d’autres encore. C’est une boite qui tourne depuis 40 ans d’un propriétaire à l’autre, comme souvent dans le transport. On fait surtout du transport express1, c’est-à-dire du monocolis, plus au détail. C’est différent d’Eurotranspharma qui eux font de la palette, des plus gros volumes.
Je bosse à Sucy-en-Brie, on livre le 94 et le 75. C’est plutôt une petite agence qui fait de la livraison, une cinquante de tournées par jour. Mais livrer Paris c’est pas simple, c’est beaucoup d’hôpitaux et une circulation infernale. On fait 50% de médical, mais aussi plein d’autres trucs. En ce moment, le médical nous permet de limiter la casse, vu la baisse des autres produits. Et les intérimaires compensent l’absentéisme, mais pas avec le même savoir-faire, donc ça complexifie le travail.
Comment ça se passe dans vos entrepôts, depuis la crise sanitaire ? Vu le rôle essentiel de vos activités d’approvisionnement du médical, vous avez le droit à des protections ?
Mohamed : Depuis le Covid, c’est la guerre. Les cas se multiplient chez nous, avec au moins un cas à Arras, un à Lyon, un à Moussy, un autre dans un dépôt à Reims. Plus plein de suspicions qu’on ne peut pas vérifier, puisque de toute façon il n’y a pas de test. Dans des univers de travail comme le nôtre, ça peut aller très vite. On a vu à PSA Vesoul2 ou à Fedex Roissy3, à quelle vitesse ça peut aller.
On essaie d’avoir des masques et du gel mais c’est pas évident. Et pourtant, c’est nos clients qui fabriquent ça. On a fait un tract là-dessus, on a envoyé des mails, où clairement on menaçait d’arrêter de les livrer s’ils n’étaient pas capables de nous fournir du matériel de protection. Et finalement ça marche à peu près, pour le moment.
En fait on a fait un premier débrayage pour exiger un nettoyage complet des locaux, la désinfection des camions et des nouvelles livraisons d’équipements. Vu notre activité, on avait quand même quelques masques et des gants, mais on n’était pas sûr d’en avoir assez et ça n’avait pas l’air de perturber la direction. Au final, en mettant la pression, on a reçu une commande de 30 000 masques et du gel en quantité. On ne sait pas trop comment ils ont obtenu tout ça, mais ils se débrouillent quand ils sont sous pression. Le gel il vient d’une boite qui est gérée par une société du groupe, donc c’est la moindre des choses qu’on puisse en avoir. Les masques, il y en a qui sont venus directement de Chine.
Mais l’autre problème, c’est les salariés en sous-traitance. À Moussy on est 60 personnes, pour autant de sous-traitants, qui bossent sur la chaîne de tri, collés les uns aux autres. Pour eux c’est impossible de respecter les distances de sécurité. Les masques et le gel, au départ c’était que pour les chauffeurs, il n’y avait rien de prévu pour les autres, ni pour le personnel administratif, ni pour les ouvriers du tri. Donc ce sont les chauffeurs qui se sont organisés eux-mêmes, avec la CGT, pour faire distribuer des masques sur la chaîne et dans les bureaux. Aujourd’hui encore, c’est nous qui faisons le job, sinon ils n’auraient pas de masques.
Les patrons pensaient qu’on irait au casse-pipe sans rien. Maintenant ils nous filent des masques chirurgicaux, ça protège des projections c’est sûr, mais ça ne protège pas de la contamination. On les a prévenus : si on n’a pas de masques FFP2, on ira vers un droit de retrait. Surtout qu’on livre des endroits sensibles, des pharmacies, des hôpitaux.
Artur : Chez nous c’est pareil, au niveau des conditions de travail, c’est « tu viens avec ta bite et ton couteau, et tu te démerdes ». De toute façon la haute hiérarchie est en télétravail, donc les types pilotent l’activité sans aucune visibilité. C’est le bordel.
Heureusement, la CGT est fortement implantée dans ma boite. Dès le début on a été attentifs, on a imposé le lavage des mains ou les règles de distance. Dès le 26 février on a fait une demande de réunion extraordinaire pour le Covid, alors qu’à l’époque les gens parlaient de ça comme un truc lointain. Nous on savait très bien qu’on serait en première ligne.
Maintenant les chauffeurs n’entrent plus dans les entrepôts, ils restent à une bonne distance, pour éviter les contacts. On a reçu des masques, mais seulement des masques chirurgicaux, pas des FFP2. Mais les premières semaines on a dû faire sans.
Ça change quoi le Covid, dans votre quotidien de travail ? Est-ce que les gens perçoivent différemment les risques du travail ? Avec éventuellement la tentation de quitter son poste ?
Mohamed : C’est devenu super flippant les livraisons, surtout dans les lieux où il y a un risque évident. L’autre jour, j’ai fait un cabinet médical à Garges-lès-Gonesse, il y avait la queue jusqu’à l’extérieur et à chaque étage des gens qui attendaient. Tout le monde toussait là-dedans, donc forcément tu te poses des questions quand tu livres. Moi je veux plus livrer des lieux comme ça si on n’obtient pas les équipements adéquats.
Il nous faut du gel en quantité suffisante et au moins une paire de gants par jours. Et des masques FFP2, ça je n’en démords pas. Je sais bien qu’il y a pénurie, mais ce n’est pas de notre faute. De toute façon, nous et le personnel hospitalier, on est dans la même boucle. On peut facilement se le transmettre et si on ne bosse plus les soins deviennent impossibles.
Avec la famille aussi, on est obligé de faire super attention. Quand je rentre chez moi, je me déshabille devant la porte pour éviter les contagions. Tout ce que je ramène dans la maison, je le désinfecte. Je ne veux pas contaminer mes proches.
Artur : Moi je ne vois plus personne depuis le confinement. Je rentre direct chez moi, parce que je pense avoir été contaminé. Au début du confinement, j’ai fait une grosse bronchite, mais pas moyen de vérifier de toute façon. Ceux qui risquent tout, c’est des gens comme nous, à 1000-1500 balles.
D’ailleurs on le voit bien, en ce moment on a des 50% voire 75% d’absentéisme dans certains services. Les gens sont hyper anxieux, parfois ils ont des symptômes du Covid, ou alors une santé fragile, donc ils ne viennent pas. Mais si ça se trouve, on a évité le pire grâce à des réactions comme ça. Sinon ça se propage partout. Donc il y a plein d’arrêts maladie et les employeurs ferment les yeux. C’est la sécu qui paye, tout le monde est content. Ils essaient de remplacer par de l’intérim mais ça devient galère de trouver des gens qui veulent bosser et surtout qui maîtrisent un peu le boulot. À la limite, les directions s’en foutent, avec leur gestion comptable de la crise, ça leur fait des économies sur la main d’œuvre. Ça, plus le décalage des congés, les congés imposés, plus un peu de chômage partiel, ça fait de bonnes économies pour eux.
Justement, elles réagissent comment vos directions ? On les voit dans les médias qui se vantent de livrer du matériel médical « en toute sécurité »…
Mohammed : Les directions elles sont dans le déni total. Elles profitent de la pénurie de test pour faire comme si de rien n’était. On a eu un cas où le médecin généraliste a clairement dit au gars que c’était le Covid. Mais l’entreprise ne communique pas là-dessus. Elle fait comme si ce n’était pas son problème puisque c’est le médecin personnel qui a diagnostiqué. Au final, on l’a su parce qu’on a mené l’enquête. En plus, les gens qui sont diagnostiqués restent chez eux 14 jours, donc nous on l’apprend beaucoup trop tard.
Artur : Ça c’est clairement un gros souci : il n’y a aucune transparence. Les directions communiquent très peu sur les cas de Covid, surement pour éviter que les gens flippent et ne viennent pas travailler. Ils préfèrent cacher la vérité pour s’assurer que l’activité continue de tourner. Et les conséquences on ne les verra qu’après, même si c’est trop tard.
De toute façon, les directions sont en télétravail, elles gèrent à distance depuis un PC. Mais le tracking des colis en télétravail, c’est naze. Il faudrait s’appuyer sur les gens qui sont sur le terrain pour prendre les bonnes décisions. On reçoit des encouragements tout le temps, des mails, mais ça c’est facile. En réalité l’humain passe après, en temps de crise comme en temps normal.
Nous en plus, on est classé d’ « utilité publique », donc ils nous disent « Venez travailler ! ». Dès qu’ils ont senti venir le confinement, on a reçu des messages comme ça, pour bien nous faire comprendre qu’on allait continuer de bosser. Comme quoi ils savent anticiper, quand c’est pour faire tourner la boite.
Mohamed : La direction chez nous, ils sont au cœur du bordel. C’est la famille Baudry, ils sont main dans la main avec l’État4. La sœur du PDG, elle est en contact direct avec la cellule de crise présidentielle. Il y a qu’à voir le CICE, ils touchent 400 à 500 000 euros par ans avec ça, alors qu’on a perdu 300 salariés ces dernières années.
A côté de ça, quand on leur parle de la prime Covid, ils montent sur leurs grands chevaux en mode « Vous ne vous rendez pas compte, parler de ça alors qu’on est en pleine crise ». Mais la crise, c’est c’est nous qui la subissons. Les risques, c’est nous qui les prenons. Après qu’on a rédigé un tract offensif là-dessus, ils ont un peu changé de ton. Maintenant ils disent « on verra pour la prime… ». Vu comment ils fonctionnent, je pense qu’ils vont nous filer une prime de 50-100 balles, pour calmer les gens. En plus, ils parlent de « critères » pour distribuer les primes, genre ceux qui ont dû s’absenter pour garder leurs enfants, ce ne sera pas possible. C’est cynique. Surtout que nous, on n’a pas perdu d’activité. En ce moment, le fret a même tendance à augmenter sur certaines choses. On a fini le mois d’avril avec une grosse activité.
Artur : Eux ils sont déjà dans l’après, ils pensent aux gains et aux pertes. Mais nous en s’en fout, là il faut gérer l’humain. Des trucs comme les 60 heures par semaine, il ne faut pas se leurrer, ce n’est pas pour maintenant, c’est pour après. Leur décret, il est valable jusqu’au 31 décembre, donc ils auront tout le temps de s’en servir. Le rapport de force, au niveau social, il va se faire après.
Dans ce que vous dites il y a un point noir qui revient souvient, c’est la sous-traitance. Comment est-ce que ça a transformé le secteur ? Comment est-ce qu’on en vient à dépendre de la sous-traitance dans un secteur aussi essentiel que la santé ?
Mohamed : La sous-traitance, c’est massif. Il n’y a aucune communication là-dessus, mais on a demandé une expertise pour savoir : l’expert a évalué ça à 600 personnes en sous-traitance, contre 400 salariés seulement en interne. Depuis plusieurs années ça a basculé, on a perdu énormément de monde, au moins 300 personnes, et la sous-traitance a explosé en compensation.
La sous-traitance, c’est des dizaines de petites boites où rien n’est fait pour protéger les salariés. Et forcément, on fait du sale boulot. Par exemple, on livre des produits sensibles, comme de la méthadone. Avant c’était réglementé, on faisait ça de façon vraiment professionnelle. Mais maintenant, ils filent une pleine livraison de méthadone à des sous-traitants qui n’ont jamais fait ça. C’est irresponsable. Et pourtant il y a déjà eu des grosses alertes, comme l’affaire Méningitec. C’est un vaccin contre la méningite, pour les nourrissons, dont le groupe gère la distribution. Il y a des lots qui ont été distribués alors qu’ils contenaient des métaux lourds. Des enfants ont été contaminés, avec de la fièvre, des vomissements, voire des détresses respiratoires.
N’empêche, avec la crise du Covid, il y a eu un débrayage des sous-traitants, sur la chaîne de tri. Les gars se sont arrêtés pour demander des protections et dès le lendemain il y a eu une réaction. Pas des boites de sous-traitance, mais du patron de notre agence qui leur a distribué du matériel de protection. Ce n’était jamais arrivé ici. Franchement c’est courageux de leur part, d’habitude personne ne dit rien. Et si tu l’ouvres, de toute façon tu risques de dégager. Comme il y a un gros turn-over sur la sous-traitance, c’est difficile de mobiliser les gens.
Artur : À la base le médical, c’était de la logistique rapide, efficace et encadrée. Mais c’est fini tout ça. Maintenant, ma boite c’est 95% de chauffeurs sous-traitant et 5% de chauffeurs maison. Et les sous-traitants, c’est plein de petites boites qui livrent à l’arrache, plus de 400 boites au total. On a dû aller au tribunal pour savoir combien de personnes ça représente : au niveau national, l’effectif officiel c’est 700 salariés, mais en fait c’est 3000 salariés avec les sous-traitants.
Chez les sous-traitants du transport, il y a beaucoup de travail au noir. Tu le vois bien de toute façon, avec des types qui sont censés livrer 80 points en une journée, ce qui est clairement impossible dans Paris. En fait ils sont deux dans le camion. C’était ça aussi l’affaire Chronopost à Alfortville, ils embauchaient massivement des sans-papiers, pour les faire bosser dans des conditions de merde5. En Italie, c’est encore pire, c’est pour ça qu’ils sont comme des oufs là-bas, surtout dans le Sud, c’est pour ça les émeutes. Les gens qui gueulent, c’est plein de chauffeurs qui sont plus payés, c’est sûr.
En fait c’est toute la chaîne du transport qui s’est dégradée progressivement, avec les restructurations et la sous-traitance. Ça a des conséquences dans la crise actuelle, sur les livraisons de matériel médical ?
Artur : Tout le modèle du transport c’est de la merde maintenant. Il n’y a pas un seul dépôt nickel, ou alors t’en as un pour la vitrine. C’est des prix bas, des galériens partout et des business man qui ne connaissent pas le terrain. En temps normal, ça marche plus ou moins, mais en état de crise, ça ne suit plus.
Il faut ajouter un point important : la chaîne logistique aujourd’hui, c’est du flux continu, personne ne maîtrise rien. C’est des trucs informatiques, avec des commandes automatiques, tu ne peux plus ajuster, tu navigues à vue. Sur les livraisons de masques, on voit bien le bordel puisque c’est nous qui les livrons. Ils envoient des palettes, mais ils ne suivent même pas les livraisons. Le suivi est complètement HS. On s’est retrouvés avec une palette de masques et de gants abandonnée sur le quai, et personne ne répondait chez le destinataire. On a fini par les retourner nous même à l’expéditeur, pour éviter que ça stagne. C’est partout comme ça, il y a plein de masques qui moisissent sur les quais, on commence à manquer de place, chez Geodis il y a eu des vols… Mais c’est à l’image de ce qu’est devenue la chaîne de distribution en France.
D’ailleurs, c’est fou de voir qu’il n’y a pas de cellule de crise, aucune réactivité pour fluidifier les approvisionnements, par exemple en indiquant ce qu’il faut fermer et ce qui doit rester ouvert. Nous on pourrait très bien arrêter des trucs et concentrer l’activité sur les premières nécessités. Mais il n’y a rien de prévu pour ça. T’imagines un virus qui serait mortel à plus de 3% ? Mais on ferait comment ? À la limite on était mieux préparés pour le H1N1. À l’époque on obligeait les entreprises à faire des plans de continuité en cas de crise et les représentants du personnel étaient impliqués pour préparer ça. Mais là, rien du tout, les patrons font ce qu’ils veulent.
Vous pensez que cette crise va avoir des répercussions importantes dans le secteur, pour l’après ? Est-ce que ça peut aggraver les tendances qui sont déjà en cours, même si on voit bien les effets catastrophiques de tout ça ?
Artur : Niveau économique, on est dans un trou noir. Les grosses boites comme la nôtre, elles vont s’en sortir, même si on doit rester vigilants sur la façon dont ils vont combler les pertes. Mais c’est les petits qui vont morfler. On risque des faillites en cascade, avec des petites boites qui au final seront rachetées par les gros du secteur. C’est déjà ce qui s’est passé avec la crise de 2008, un gros mouvement de concentration. Et derrière les cycles de concentration, il y a les restructurations, les réorganisations, donc c’est toujours les salariés qui trinquent.
En fait, c’est des grosses boites comme Geodis qui pourraient tout récupérer. Et comme l’État est actionnaire de ces boites, de toute façon il va les pousser à absorber les faillites, pour éviter le crash. À travers ces filiales logistiques, c’est l’État qui va payer, donc c’est nous au final, avec nos impôts. En 2008 c’était exactement ça : ma boite tournait à perte, donc Geodis a racheté pour créer Geodis Ciblex. Et en 2014-2015, ils ont revendu. C’est comme ça depuis 30 ans et là ça va recommencer de plus belle. Les grosses boites du transport s’arrangent entre elles de toute façon. Ils ont déjà été condamnés pour ça, pour des ententes sur les prix, ce qui pénalise les petites boites6.
Et entre temps, les restructurations s’enchainent. Par exemple, moi je suis arrivé il y a plus de 14 ans, à l’époque on faisait 100 000 colis par jours, avec 800 salariés. Aujourd’hui c’est 200 000 colis, avec 600 salariés. Parce qu’ils ont réorganisé de partout, ils ont mécanisé pour augmenter la productivité et ils font de la sous-traitance à bloc. Le résultat c’est que maintenant, dans des crises comme celle qu’on traverse, si la sous-traitance vacille, tout vacille avec elle.
- Dans la logistique, l’express consiste à faire transiter des biens et des matières par un entrepôt, pour des clients multiples, avec un temps de stockage qui ne dépasse pas quelques heures ou une journée.
- Malgré 128 cas suspects, la plateforme logistique du constructeur automobile PSA en Haute-Saône maintient son activité. La CGT réclame la fermeture du site pour protéger les salariés.
- Le 24 mars, un intérimaire est mort dans l’entrepôt Fedex de Roissy, un des plus gros centres de tri d’Europe, qui rassemble près de 3000 salariés et intérimaires. Après avoir retiré leurs salariés du site, les agences d’intérim les font revenir progressivement, malgré un danger évident.
- Stéphane Baudry est le PDG du groupe EHDH. Il a hérité le filon de son père, Jean-Paul, qui l’avait lui-même hérité du grand-père, Marcel Baudry, qui a créé la société CSP (Centre Spécialités Pharmaceutiques), à l’origine d’EHDH, en 1951. CSP est aujourd’hui dirigée par Laure Brenas Baudry, la sœur de Stéphane. Cette dernière a été sollicitée par la cellule de crise présidentielle pour les livraisons de masques, avant d’être doublée par Geodis, visiblement sans en avoir été prévenue (Libération, 25/03/2020).
- Après 7 mois de grève sans merci, à dormir dehors, les 27 sans-papiers du site Chronopost d’Alfortville ont finalement obtenu des papiers, contre des employeurs multiples qui ont toujours refusé d’assumer leurs responsabilités (La Poste, sa filiale Chronopost, le sous-traitant Derichebourg, Mission Intérim…).
- En 2015 les plus gros transporteurs de France ont été condamnés par l’autorité de la concurrence à une amende de 672,3 millions d’euros pour entente sur les prix ce qui pénalisait durement les petites PME en sous-traitance.