Entretien avec un Gilet Jaune arrêté à Bordeaux la veille de l'Acte 56 du 7 décembre

Pour quel motif es-tu aujourd’hui poursuivi par le tribunal de Bordeaux pour « association de malfaiteurs en vue de commettre des dégradations et des violences sur des représentants de l’ordre » ? 

Le 7 décembre dernier, la BRI, unité de police généralement en charge des affaires terroristes ou de grand banditisme, a fait irruption dans un appartement à Bordeaux où je me trouvais et a procédé à l’interpellation de 16 personnes supposées appartenir, selon eux, au « black bloc ». 

Je m’étais rendu à Bordeaux le 7 décembre pour participer à une manifestation contre la précarité et le chômage et j’ai été placé en garde à vue pendant 48 heures sans aucune raison à part celle d’avoir dormi dans un appartement avec d’autres gilets jaunes et je suis désormais sous le coup d’un contrôle judiciaire très restrictif. 

En attente de ton procès, tu as aujourd’hui effectivement un contrôle judiciaire assez exceptionnel, est-ce que tu peux le détailler ? 

Je suis actuellement placé en contrôle judiciaire en l’attente du procès avec les restrictions de libertés suivantes : interdiction de rentrer en contact avec les autres inculpés, pointage…

Ce qui constitue un contrôle judiciaire classique mais il y a aussi des particularités, qui semblent réservées aux gilets jaunes : interdiction de se rentre en Gironde et interdiction de manifestations dans les communes sièges de préfecture ou sous-préfecture des départements français. 

Comment expliques-tu cette mesure au caractère exceptionnel ?

Aujourd’hui mon incarcération a comme objectif de limiter mon droit de manifester en me prêtant des intentions fictives sans preuves concrètes. Elle s’inscrit dans une criminalisation croissante des mouvements sociaux dont les Gilets Jaunes ont grandement fait les frais. 

J’aimerais ici ajouter que j’apporte mon soutien à toutes les personnes inculpées le 7 décembre ! 

Quel lien fais-tu entre la répression que tu subis aujourd’hui et celle qui s’exerce dans les quartiers populaires depuis des décennies ? 

Les quartiers populaires ont toujours constitué de véritables laboratoires de la répression policière et judiciaire et c’est là qu’ont été expérimentées les premières mesures exceptionnelles et dérogatoires au droit commun violant manifestement la liberté de circulation. Cette répression dans les quartiers populaires a une fonction en soi et répond à sa propre logique raciste et coloniale de maintien de ces populations sous domination. Par exemple, la mise en place du couvre-feu et de l’état d’urgence lors des émeutes de 2005, couvre-feu permis par une loi déjà utilisée lors de la guerre d’Algérie ou encore en Nouvelle Calédonie. Ce qui était le germe de ce qui est devenu aujourd’hui, il me semble, une politique répressive systématique et globale. 

Pour finir, comment peut-on t’aider concrètement aujourd’hui ?

Par plusieurs moyens : tout d’abord, en relayant mon histoire mais surtout celle des victimes de la répression policière et judiciaire. Mais aussi en m’aidant matériellement via la cagnotte de soutien pour faire face à tous les frais que mon incarcération a engendré. Et enfin en soutenant les campagnes d’anti-répression portées par des collectifs comme Libérons-Les qui réalise en ce moment même une campagne avec des événements dans plusieurs villes en France et en Europe, toutes les infos sont sur leur page ! 

Lien du pot en solidarité avec les inculpés :

https://www.lepotsolidaire.fr/pot/azdvfx49?fbclid=IwAR1nL5jD0tb2tPzv7R4VnTTi9n7aSHfYBFymbGRFB758CkhSDjZA2d4Uccc#description

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