Agression militaire du Maroc dans le Sahara occidental

Ces derniers jours ont été le théâtre d’une reprise des hostilités au Sahara Occidental entre le mouvement indépendantiste du Front Polisario et le royaume du Maroc, suite à une intervention militaire de l’armée marocaine à l’extrême sud du territoire en violation flagrante du cessez-le-feu en vigueur depuis 1991. L’article qui suit permet de cerner les enjeux de ce conflit, ainsi que ses implications géopolitiques. Notons à ce propos, pour compléter l’article, que si l’Algérie appuie les revendications du peuple sahraoui (dans l’espoir de mettre la main sur un territoire aux juteuses ressources minières tout en gagnant un accès stratégique à l’océan), la France de son côté est un soutien sans faille du royaume marocain, lui fournissant assistance matérielle et protection diplomatique.

Le 13 novembre a commencé une nouvelle phase du conflit entre le Maroc et la République arabe sahraouie démocratique (RASD), 29 ans après le cessez-le-feu conclu entre les deux parties. Le Front Polisario (Frente Popular de Liberación de Saguía el Hamra y Río de Oro) a déclaré la guerre au Maroc en réponse à une incursion de l’armée marocaine qui a attaqué des manifestants civils sahraouis à Guerguerat.

L’agence de presse marocaine MAP a à son tour confirmé que le Maroc avait lancé une offensive militaire dans la région de Guerguerat pour mettre fin à la manifestation des civils sahraouis qui bloquaient pacifiquement le passage de la frontière depuis le 21 octobre dernier. Le Front Polisario accuse au contraire le Maroc de violer « de manière flagrante » le cessez-le-feu en pénétrant en territoire sahraoui et en attaquant des civils.

Suite à ces événements, le Secrétariat national du Front Polisario a tenu une réunion d’urgence au cours de laquelle il a été affirmé que « l’armée marocaine a rompu le cessez-le-feu à Guerguerat », et a déclaré la guerre au Maroc : « Le Front répondra de manière appropriée et conformément à ce qui a été promis précédemment », peut-on lire dans le document officiel. Les dirigeants sahraouis ont alors annoncé à la population que « la grande bataille a commencé et avec elle la Grande Guerre pour la libération de tout le peuple ». Le Front Polisario a appelé « tout le peuple à se préparer à répondre à cette agression brutale et à franchir une nouvelle étape décisive dans la lutte pour la liberté, la dignité et la souveraineté ».

Le président de la République sahraouie et secrétaire général du Front Polisario, Brahim Ghali, a envoyé le même jour une lettre au secrétaire général des Nations unies, le Portugais António Guterres, et à la présidente du Conseil de sécurité de l’ONU, Inga Ronda King (représentante de Saint-Vincent-et-les-Grenadines), pour dénoncer l’agression marocaine : « C’est avec une grande urgence et préoccupation que je vous écris pour vous informer que les forces militaires marocaines ont lancé une attaque brutale contre des civils sahraouis non armés qui manifestaient pacifiquement à Guerguerat, dans le sud-ouest du Sahara occidental », peut-on lire dans la lettre.

Le secrétaire général du Front Polisario a ensuite dénoncé « l’opération des forces marocaines contre les civils sahraouis qui est un acte d’agression et une violation flagrante du cessez-le-feu que les Nations unies et le Conseil de sécurité doivent condamner ». « Face à cet acte d’agression, les forces militaires du Front Polisario ont été contraintes d’affronter les forces marocaines pour la légitime défense et la protection de la population civile. Nous tenons (…) l’État marocain occupant responsable des conséquences de son opération militaire », a-t-il ajouté. « En lançant cette opération militaire (…) l’État marocain occupant a gravement compromis non seulement le cessez-le-feu et les accords militaires, mais aussi toute possibilité de parvenir à une solution pacifique et durable », a conclu M. Ghali.

En effet, selon l’accord militaire n°1, signé par l’ONU séparément avec le Maroc et le Front Polisario, il ne peut y avoir d’hommes armés ni du Maroc ni du Polisario dans la bande de Guerguerat, à la frontière entre les territoires contrôlés par les deux parties. L’opération lancée par les forces militaires marocaines constituerait donc une violation flagrante de cet accord. Le cessez-le-feu, signé entre Marocains et Sahraouis sous les auspices des Nations Unies en 1991, « appartient au passé », a déclaré Ould Salek, ministre des Affaires étrangères sahraoui. Le Front Polisario estime que l’attaque lancée vendredi par le Maroc constitue une violation de cet accord.

En réponse, le porte-parole du Secrétaire général de l’ONU, le Français Stéphane Dujarric, a exprimé la préoccupation de l’ONU au sujet des récents événements dans le Sahara occidental, et a transmis aux parties impliquées dans le conflit l’appel du Secrétaire général de l’ONU à donner une pleine liberté de mouvement à la mission de l’ONU dans ce territoire pour remplir son mandat.

Le gouvernement algérien, qui soutient historiquement les revendications du peuple sahraoui contre le Maroc, est également intervenu dans cette affaire. Par une déclaration de son ministère des affaires étrangères, le pays voisin a vivement regretté les « graves violations » perpétrées par Rabat. Le gouvernement algérien a demandé la cessation immédiate de ces opérations militaires, « dont les conséquences sont susceptibles d’affecter la stabilité de toute la région ». Le gouvernement de Mauritanie a également exprimé ses préoccupations.

Samedi 14 novembre, des sources du Front Polisario ont déclaré que les affrontements se poursuivaient. Les forces armées du Front Polisario ont révélé que les attaques contre les positions de l’armée marocaine ont commencé vendredi soir et se sont poursuivies jusqu’aux premières heures de ce samedi. Les Sahraouis ont affirmé avoir effectué plusieurs raids contre le mur de défense marocain et des bombardements d’artillerie dans les régions occupées d’Aousserd et de Mahbes. Selon le ministère de la défense de la RASD, les forces sahraouies ont mené des « attaques massives » le long du mur de défense marocain dans les régions de Mahbes, Hauza, Aousserd et Farsia, causant « des dommages humains et matériels à l’ennemi ».

Via World Politics Blog

Partager